Crêtes du Jura en hiver

La neige, dans le Jura, c'est aussi indécis que le soleil en Normandie ! 

Après un long mois à comparer ce vieux massif à la Laponie, on débarque sur les sommets en tee-shirt, presque, en tout cas sans le moindre besoin de raquettes. Et sur une rando de 2 jours, on aura marché le premier jour dans un mélange de plaques de neige et d'herbes hivernales, et le deuxième sur une neige suffisamment dure pour ne pas s'enfoncer. Entre les deux, une nuit mémorable sous la tente, non pas pour une qualité de sommeil sans faille, mais pour un emplacement assez magique, face au Mont-Blanc, et un vent à décorner tous les buffles jurassiens !

À l'office du tourisme du coin, on nous avait chaudement déconseillé cette rando, peu tracée en hiver et dangereuse en raison des plaques de neiges instables qui s'avancent au-dessus du vide. Au final, tout était parfaitement tracé, le balisage estival n'étant qu'à moitié recouvert par la neige, et nous nous retrouvions à pique-niquer en compagnie de familles entières: non, cette partie n'était franchement pas risquée, à moins de s'avancer dans une parfaite inconscience sur ces quelques mètres de plaques blanches qui, en effet, nous auraient fait chuter assez dramatiquement. M'enfin, faut quand même être abruti pour ne pas les voir...

Le premier jour le vent n'a presque pas soufflé, ou du moins me laissait-il voler sans risque de voir mon drone emporté vers le lac Léman ou les crêtes alentours. De haut, on distinguait mieux l'avancée de cette crête découpant le paysage entre terre et neige, entre massif forestier côté français et civilisation des villes planquées contre le lac côté suisse.

Puis, sans crier gare (en même temps je vois mal comment un col pourrait le faire), le Colomby de Gex s'est pointé face à nous, qui étions partis de la Faucille, avec toute sa blancheur à peine contrastée par quelques points d'herbe jaunâtre qui finiront par disparaître totalement lors des prochains kilomètres.

On a quand même réussi à se trouver un coin de verdure pour planter notre tente et ne pas risquer une nuit de congélation. Se croyant plus malin que le vent, on a choisi un emplacement sous une petite butte pour mieux s'abriter...

Il faut dire que la vue n'était pas vilaine lorsque l'on grimpait sur cette butte, ou sur le dos du drone. Genève, lac Léman et Mont-Blanc sur un même plan.

Dès la tombée de la nuit, on a vite compris ce qui nous attendait : certes, les lumières de Genève s'allumaient comme des lucioles, mais nous, notre réchaud, on avait bien du mal à l'allumer avec ce vent qui, bien sûr, nous avait pris par surprise et ne venait pas du tout du côté de la butte: nous étions pris à son piège. Toute la nuit, la tempête a soufflé, et nous pensions finir sans abri. Toute la nuit, ça cognait contre moi, et les sardines qui maintenaient le double toit sautaient une à une.

Pourtant, le jour se levait, et nous étions encore là, avec notre tente. La brave, elle a tenu !

Dès lors, nous étions increvables: et malgré la tempête qui a continué de nous secouer violemment toute la journée, alors que nous terminions de longer les crêtes, nous lui avons résisté !

À partir de Lelex, les crêtes ont changé de visage: nous sommes passés dans un décor de sapins, de canyons, de neige profonde: tout était plus beau !

Arrivés au point culminant, le Crêt de la Neige, 1720m, nous savourions ce panorama éblouissant avec le Jura forestier d'un côté et le Mont-Blanc de l'autre. Il nous fallait simplement garder notre équilibre, car le vent désirait plus que tout prendre sa revanche et nous emporter dans l'un des ravins qui nous entouraient, ou plus modestement dans l'un de ces trous de neige...


Croix du reculet
Croix du reculet

Avant de redescendre, je tente un petit survol en drone malgré les conditions difficiles et ce vent qui n'en finit plus de nous faire chanceler. Mais il ne m'a fallu que quelques secondes pour comprendre que c'était une bêtise: mon drone se faisait littéralement emporter et ne parvenait pas à revenir à contre-courant du vent. Heureusement, en le ramenant rapidement à basse altitude, il a réussi à braver la bourrasque pour revenir à moi. Un seul cliché réussi:

 

 

 

 

 

Arrivés au pied du Reculet, il était temps pour nous de redescendre sur terre. Fini la tempête, à nous la grimpette à l'envers: l'exercice est périlleux sur un sentier à peine balisé qui slalome entre les arbres déracinés, les troncs qui font barrage, et les pieds à moitié dans la neige et les feuillages mouillés. Les genoux en prennent un coup, mais tiennent le choc: nous terminons sans encombre cette belle rando sur les crêtes.

Notre itinéraire en deux jours


Petit aperçu en vidéo... comme d'habitude :-)