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Gorilles dans la brume : voyage en Ouganda 1/3

Depuis un an, j'organise ce voyage. C'était, comme on dit banalement, un rêve, qui va devenir réalité. Pour le passionné d'animaux que je suis, le gorille représente l'une des espèces les plus merveilleuses qui soit. Plus encore, c'est la rencontre et l'interaction avec ce géant, si proche de l'homme, qui laisse un souvenir impérissable. 

Pourquoi l'Ouganda ? oui, les gorilles des montagnes habitent aussi les forêts de la R.D.C et du Rwanda. En fait, leur territoire chevauche ces trois pays. Mais la République Démocratique du Congo en ce moment, ce n'est pas très safe de s'y aventurer. Plusieurs rapts ont été signalés dans la zone nord-est, et le parc des Virunga, maison des grands singes, est souvent le théâtre de conflits entre les rangers et les populations locales, ou les braconniers. Pour ne rien arranger, le terrorisme s'invite depuis peu dans cette région (une attaque a d'ailleurs été déplorée en avril 2019). 

Côté Rwanda, aucun problème d'instabilité politique ni de présence terroriste. Au contraire, le pays est souvent cité comme modèle de développement économique et politique en Afrique. Le tourisme y représente une industrie très importante et en pleine croissance. Du coup, le gouvernement n'hésite pas à en tirer profit économiquement: le permis de visite des gorilles s'élève à 1500$/pers (rappelons qu'il permet de passer 1h auprès des primates). Autant dire que le choix restant était vite vu: en Ouganda, ce même permis coûte aujourd'hui 600$. (Attention, ces prix évoluent rapidement: il est passé, au Rwanda, de 750$ à 1500$ d'un coup...en Ouganda, il est question qu'il passe à 800$ dans les prochaines années).

De plus, l'Ouganda semblait offrir de nombreuses autres merveilles: de beaux parcs nationaux exhibant la savane africaine, la visite des chimpanzés dans une autre forêt, de magnifiques paysages de plantations et des gens adorables. Que demander de plus ? si, un prix intéressant... et c'est tout trouvé justement !! grâce à mes anciens contacts dans le tourisme, j'ai contacté l'agence locale Shaka Tours & Travel (www.shakatoursug.com) et Joshua, un super gars, m'a tout organisé pour un devis final bien moins élevé qu'en passant par une agence classique (principe normal dans le monde du tourisme: moins d'intermédiaire = moins de marge mais 0 contact physique).

 

Allez, on y va ?


Bon, il faut bien trouver un défaut à ce pays: et sans hésiter, nous mentionnerons l'état des routes. Pourtant, je ne suis pas volontaire à voir le bitume recouvrir l'ensemble du territoire. La piste reste l'un des ingrédients majeurs d'une ambiance "safari africain". Mais il y a piste et piste. Et ici, on parlera plus de chantier. Oui, les infrastructures routières sont en véritable chantier dans tout le pays. Certes, cela annonce pour le futur de belles évolutions. Mais pour le moment, ce qu'on appelle ici le "massage africain", c'est-à-dire la conduite sur routes défoncées, s'avérera être l'activité principale de notre voyage. Nous aurons parfois jusqu'à 8h de route dans la journée. Heureusement, 2 nuits par étape sont prévues, ce qui permettra de ralentir la cadence un jour sur deux.

Anecdote locale: sur chaque chantier animé de noirs africains, un chapeau de paille détone. C'est celui d'un asiatique, chef  de chantier. Les chinois ont en effet investi en masse sur les projets de développement des routes en Afrique, et l'Ouganda ne déroge pas à cette règle. Étonnante image à chaque passage de chantier.

 

Depuis la fenêtre ouverte du van, la poussière file et les visages défilent.


Murchison National Park

Nous démarrons le périple par la visite du parc de Murchison, à 8h de route au nord de Kampala, la capitale.

Ce parc réunit les principaux animaux de la savane africaine, à l'exception -pour les plus connus - du rhinocéros et du guépard.

 

 

Toit ouvert, on déambule dans une superbe savane ouverte et totalement verte. La saison humide apporte son lot de couleurs et de fertilité. Les troupeaux sont au rendez-vous. Les oiseaux aussi.

Nombreuses familles d'éléphants avec leurs tout-petits.

Du côté des girafes, on a remarqué qu'elles étaient bien plus douées à 1, 2, 3 soleil ! qu'à cache-cache. En effet, elle peuvent ne pas bouger pendant des lustres, mais en pensant qu'elles sont bien cachées derrière un arbre mort...

Cobes ougandais
Cobes ougandais

L'après-midi, la partie croisière est beaucoup moins grandiose. Pourtant, il s'agit d'aller au pied des chutes d'eau qui ont donné le nom au parc. Mais côté animaux, mis à part quelques hippos peu farouches et un croco fidèle à son espèce, immobile, on aura pas grand chose à se mettre sous la dent.



Portraits de jeunes ougandais

La route est longue et il nous prend souvent l'envie de faire une petite pause. 

Entre Murchison et Kibale, nous découvrons une jolie petite église accolée à une école primaire (comme souvent en Ouganda, les écoles étant gérées par la paroisse du village). Nous nous arrêtons, et allons à la rencontre des petits...

d'abord de loin, je les observe aller chercher l'eau au puit. Je propose les aider avant qu'ils se regroupent petit à petit autour de moi, avec cette curiosité et ces sourires sans fin. Mon appareil, que je voulais cacher au départ, deviendra le témoin de toutes les poses. Les caractères se révèlent chez les enfants. Des plus joueurs aux plus timides, des plus confiants aux plus méfiants, je les laisse venir à moi pour m'immiscer un peu dans leurs joies. Un très beau moment. Je leur fais découvrir la photographie et ma petite cousine leur montre l'art du dessin. Eux nous montrent le bonheur du moment simple, ôté de tout aspect matériel.


Parc national de Kibale

Ce parc, c'est la forêt. La forêt tropicale, la forêt dense, la forêt des chimpanzés.

Avant de vous la faire découvrir, je m'interrogeais sur la différence entre la jungle et la forêt. Voici ce que j'ai trouvé:

en fait la forêt est le terme général désignant les espaces arborés et boisés recouvrant une grande partie du globe, et englobant notamment la forêt tropicale, aussi appelée jungle en fonction de son contexte: avant les années 1970, le terme jungle est largement utilisé pour désigner les forêts tropicales ou humides. La plupart des auteurs attribuent cela à la façon dont les premiers explorateurs européens ont voyagé à travers des rivières largement bordées d’une végétation dense. C’est pourquoi de nombreux auteurs décrivent les régions asiatiques ou africaines comme des “jungles”, tandis que les végétations naturelles d’ Amérique et d’Europe sont qualifiées de “forêts”.  Dans la culture populaire, le mot jungle est aussi métaphoriquement utilisé pour désigner la sauvagerie ou l’anarchie. On l’associe souvent à l’expression “survie du plus fort”, car elle fait référence à un lieu largement dominé par une concurrence intense et féroce. Par exemple, les centres-villes sont souvent surnommés jungles urbaines en raison de la lutte qu’il faut mener pour survivre dans une culture très individualiste.*

* source:  https://jeretiens.net/difference-entre-une-jungle-et-une-foret

Bon alors évidemment, dans cette forêt, nous n'y allons pas pour admirer les arbres, aussi beaux soient-ils. Elle abrite en fait une grande population de chimpanzés auxquels nous allons rendre visite. Comme pour les gorilles (que nous avons gardé pour la fin du voyage), nous nous rapprochons des rangers du parc, tous en treillis et armés d'un fusil, pour partir "tracker" les singes dans cette végétation dense. Pourquoi le fusil ? simple mesure de protection contre des éléphants trainant parfois dans les parages, et pouvant se montrer dérangés par notre présence. Un coup de feu en l'air réussit toujours à les convaincre de ne pas jouer les fortes têtes.

Après un petit brief par notre ranger, nous nous enfonçons dans la forêt aux chants multiples. Nous n'aurons pas à marcher plus de 30mn avant d'entendre les premiers cris des chimpanzés, encore dans les arbres. Assez vite nous les verrons débouler au sol et passer devant nous pour aller chercher d'autres arbres à fruits. Ils deviendront alors nos meneurs, nos guides à quatre pattes que nous suivrons le long des petits sentiers, ou carrément en s'enfonçant plus profondément dans la végétation, jusqu'à ce qu'ils trouvent un endroit à leur goût pour se poser. Ce moment de marche est assez magique car nous sommes alors des leurs et ils nous invitent à les accompagner. 

Bon alors, vous venez ??
Bon alors, vous venez ??

Je me suis pas mal concentré sur les gros plans, notamment de leurs mains. Car ce sont en grande partie elles qui nous confondent avec nos cousins. La manière avec laquelle ils les posent, ou lorsque ils s'allongent sur le dos pour attraper leurs pieds comme le font les bébés sur leur table à langer... troublant.



Community tour

Plantations de thé
Plantations de thé

Nous profitons d'une après-midi libre pour faire un tour du village voisin et rencontrer les artisans locaux.


Le premier est éleveur de vaches. Il a un beau terrain, 79 ans et...26 enfants, dont les deux derniers sont ici à ses côtés !

Le second a moins d'enfants, mais il prépare des petits breuvages alcoolisés à base de banane (gin et bière) qu'il vend aux commerçants du village.



Cette dame fait du café. Elle nous fait la démonstration intégrale du concassage, tri et cuisson devant nous. Ci-dessous, elle s'exécute au tri des graines pour retirer les restes de coquilles, tout ça grâce à son souffle magique. Elle a une dextérité et une souplesse à faire rêver plus d'un septuagénaire chez nous...

Lui, c'est le magicien du village, le guérisseur. Très populaire, il peut aider à régler les conflits de voisinage ou prodiguer un filtre d'amour. Il soigne les morsures de serpent et les maux d'estomac. Entre autres. Dispose d'herbes médicinales, de crânes d'animaux, de liqueurs exotiques etc.



Par chance, nous terminons le tour de la communauté juste à l'heure de l'arrivée de l'orage. Le ciel se pare alors d'une couverture noire grisonnante et grondante, plongeant les plantations de thé et les bananiers dans une lumière magistrale


Déjà de belles émotions après la visite de ces deux premiers parcs nationaux. Nous continuons notre route en direction du sud et du parc de Queen Elisabeth, réputé pour ses animaux de savane, et nous découvrons les étonnantes tours de bananes que les locaux vendent sur les bords de routes.

 

Pour la suite du voyage, c'est par là